Décès de Marie-Claire Blais

La Fondation perd une amie

Le décès de Marie-Claire Blais, l’écrivaine bien connue. représente pour la Fondation la perte d’une amie et d’une fidèle donatrice, grande admiratrice de Léa Roback. À l’occasion du centenaire de Léa Roback, en 2003, la Fondation avait publié une brochure sur les boursières, intitulée « Que sont-elles devenues? ». Responsable de l’édition de cette publication, Irène Ellenberger, avait demandé à Marie-Claire Blais d’en écrire la préface, ce qu’elle avait accepté. Elle nous avait envoyé ce texte que nous vous invitons à lire. Il garde toute son actualité…

Marie-Claire Blais au Salon du livre de Montréal 2010
Marie-Claire Blais au Salon du livre de Montréal 2010

« Quinze boursières de la Fondation Léa Roback poursuivront cette année leurs études, dans de multiple domaines, que ce soit des études secondaires, universitaires, ou des études dans des écoles de métiers, ce sera pour chacune de ces boursières, un épanouissement et un bonheur, une extraordinaire ouverture sur le monde, ce sera aussi l’acquisition d’un droit fondamental, ce droit d’apprendre et de connaître dont tant de femmes, d’hommes, sont privés, dans une société riche où il y a encore trop d’êtres dépourvus de ce droit. La Fondation Léa Roback porte le nom de celle qui a inspiré, par sa vie de combat, pour les droits de la personne, un tel idéal humaniste. Cette lutte exemplaire de Léa Roback, contre l’injustice sociale, cette vie de militante d’une incessante force, nous rappellent l’écrivain et philosophe Simone Weil, ces deux âmes révolutionnaires partagent un semblable engagement dans le monde ouvrier, une même compassion des autres, aussi. L’expérience ouvrière de Léa Roback commence très tôt, dès l’âge de quinze ans, ‘j’ai toujours été avec les ouvriers et les ouvrières, dit-elle, je ne voulais pas sortir des rangs, je voulais dire ‘nous’ et que ce soit ‘nous’. Simone Weil se fit ouvrière en France chez Renault, de 1934 à 1935, elle devint plus tard ouvrière agricole, toutes deux sont marquées par ces expériences dures et ne cesseront plus de lutter pour les droits des démunis. Si Simone Weil est une grande mystique libre, celle qui écrivit La connaissance surnaturelle, L’enracinement, elle est avant tout comme Léa Roback, une humaniste qui œuvre dans un monde bien concret, le monde souffrant des opprimés. On sait combien cette lutte acharnée de Léa Roback, de Simone Weil, pour les droits des femmes, la paix quand l’humanité est toujours en guerre, l’équité sociale, ou le simple accès à l’éducation, est actuelle et interminable, et que nous devons unir tous nos efforts à cette lutte aussi collective qu’individuelle, ainsi ces quinze boursières, de l’année 2003 2004, seront plus nombreuses encore, à l’avenir, de leurs connaissances privilégiées, de leur émancipation, d’autres femmes pourront bénéficier, c’est là un travail de justice, dont rêvait Léa Roback, qui se poursuivra pendant de longues années.

Celle qui disait ‘je vais agir parce que mon for intérieur l’exige’, celle qui luttait avant les autres pour le droit de vote des femmes, la militante syndicale auprès des ouvriers, ouvrières, Léa Roback, féministe et pacifiste, serait réconfortée aujourd’hui de voir son Action toujours vivante, son Action qui nous est indispensable, dans un monde toujours aussi troublé par la guerre et les injustices. »

Marie-Claire Blais.
Novembre 2003